African Population and Health Research Center (Aphrc), en collaboration avec Population Council et Ibis Reproductive Health ont organisé, le 28 novembre 2023, un atelier sur l’infanticide au Sénégal. L’objectif est de sensibiliser sur les causes de ce phénomène.
Une étude sur l’infanticide au Sénégal révèle que la majorité de ces femmes étaient à un niveau minime d’éducation scolaire. Cette enquête menée au niveau des prisons des femmes de Liberté 6 et de la Mac de Rufisque par African Population and Health Research Center (Aphrc), en collaboration avec Population Council et Ibis Reproductive Health est réalisée entre mai 2021 et janvier 2022. Cette étude montre qu’à la prison des femmes de Liberté 6, 8 femmes incarcérées ont été interrogées sur l’infanticide sur un total de 23 femmes qui croupissent dans la prison pour avoir commis ce crime. Ce sont des femmes assez jeunes mais la moyenne d’âge est comprise entre 25 et 30 ans, même s’il y a des femmes qui sont âgées de moins de 25 ans tout comme on il y a eu d’autres qui sont âgées de 40 ans.
Parmi ces femmes, l’étude présente également que 13 ont le niveau primaire, d’autres ont fréquenté l’école coranique, néanmoins trois d’entre elles ont fait les études supérieures, notamment des lycéennes et des étudiantes. Cette enquête est aussi un moyen de suivre des femmes impliquées dans des infanticides pour pouvoir documenter leurs histoires.Selon Ramatoulaye Ouedraogo, anthropologue, les gens connaissent ces histoires qu’en tant que faits divers, mais ils ne connaissent pas ces femmes qui sont derrière les histoires et leur profil. « C’est pourquoi, nous avons tenu à réaliser cette étude qualitative en rencontrant ces femmes et d’autres acteurs qui sont impliqués dans le processus de ces questions d’infanticide pour pouvoir connaître leurs histoires, qui est derrière et qu’est qui les a poussés à commettre ces actes», a-t-elle expliqué. En tout, dit-elle, « 19 femmes ont été suivies pendant un an avec des rencontres régulières dans les prisons pour gagner leur confiance ».
Elle s’exprimait hier lors d’un dialogue avec les journalistes membres de l’Ajspd autour des résultats de la recherche.Ainsi, il est ressorti dans cette étude que ce sont des filles qui sont dans une situation de vulnérabilité et beaucoup d’entre elles sont souvent confiées à des familles polygames où les parents ont divorcé. « Elles sont aussi dans une situation où elles ont perdu leurs repères. Il y a également des situations où les grossesses sont issues des cas de viol. Et les victimes se rétractent et ont peur d’être jugé par la société ou par leur famille », a déclaré Mme Ouedraogo. Ce qui fait que, parfois elles décident de se séparer de leurs bébés pour éviter les représailles et quand elles font recours à la police, il y a des doutes parfois. Car, il n’y a pas de preuves et donc c’est leur parole contre les uns et les autres. Raison pour laquelle, elles préfèrent garder le silence.
Dans ce cas, la majorité des filles ne voudront pas garder le bébé, parce qu’elles ne connaissent pas le père et ne savent pas comment vivre avec le bébé.Toutefois, dans la plupart des cas les auteurs regrettent après leur acte, parce qu’ils avouent devant la barre qu’ils n’avaient pas planifié leur acte. Elles ne voulaient pas de l’enfant certes, mais elles voulaient accoucher et confier l’enfant en adoption ou le poser quelque part devant un orphelinat pour que quelqu’un puisse le ramasser. Mais malheureusement, l’infanticide intervient au moment où elles tentent d’étouffer les pleurs du bébé pour ne pas alerter l’entourage lors de l’accouchement qui arrive par surprise. Il y a aussi des cas, surtout le viol où il y a un poids qui pèse dans la conscience de la famille qui repousse la fille qui est restée des mois toute seule et n’a personne à qui se confier.
Des recommandations fortes
Pour résoudre le problème de l’infanticide, il serait important de modifier le contexte sociétal et politique qui favorise cette pratique, à travers des interventions à différents niveaux de la société sénégalaise. Au niveau communautaire, il est appelé à mettre en place des programmes communautaires conçus pour réduire les causes des grossesses non planifiées, tout en inspirant l’empathie et faisant évoluer les attitudes à l’égard des grossesses prémaritales. Il s’agit aussi de sensibiliser les communautés sur l’incidence et les conséquences des violences sexuelles, ainsi que sur les services juridiques et médicaux existants ; de briser la culture du blâme et du silence autour des violences sexuelles pour accroitre les chances de dénonciations et de prise en charge effectives des victimes ; de s’attaquer aux peurs et croyances associées aux méthodes contraceptives à travers des programmes d’information et de sensibilisation qui répondent aux préoccupations réelles des filles et des femmes en matière de contraception et les informent sur le fonctionnement et les effets potentiels de chaque méthode, et qui peut les utiliser
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