En 2024, une trentaine d’épidémies ont été détectées, et une riposte adéquate a été apportée. Selon le Dr Boly Diop, président de l’Ordre national des médecins du Sénégal, le système de santé du pays fait preuve d’une résilience certaine, bien que des défis persistent pour assurer une réponse précoce, coordonnée et efficace face aux chocs exogènes.
Dr Boly Diop apporte d’abord une clarification conceptuelle : « Le système de santé désigne l’ensemble des organisations, institutions, ressources et acteurs qui participent à la mise en œuvre de la politique de santé d’un pays. Cette notion dépasse celle du simple système de soins », précise-t-il. Selon lui, le système de santé repose sur des choix politiques ainsi que sur une conception morale et éthique du bien-être de la population. La plupart des systèmes de santé nationaux sont composés d’un secteur public, d’un secteur privé et d’un secteur traditionnel ou informel. Leur objectif principal est d’améliorer la qualité de vie et, par conséquent, d’augmenter l’espérance de vie. Ainsi, le système de santé doit contribuer à un meilleur état de santé.
L’ancien secrétaire général du Syndicat des médecins du Sénégal (SAMES) souligne que le système de santé repose sur six piliers fondamentaux : la gouvernance sanitaire, les prestations de service, le système d’information sanitaire, les ressources humaines, la logistique et le financement de la santé.
Au Sénégal, explique-t-il, le système de santé est organisé selon un modèle pyramidal. À son sommet, on retrouve le niveau de conception et d’orientation stratégique, constitué du cabinet du ministre ainsi que des services et directions nationaux. Au niveau intermédiaire, les directions régionales de la Santé et celles de l’Action sociale assurent la coordination et le suivi des projets de santé. Enfin, le dernier niveau de cette pyramide sanitaire est constitué des districts sanitaires, qui intègrent et opérationnalisent tous les programmes de santé.
Parallèlement à cette organisation administrative, il existe une organisation pyramidale de l’offre de soins techniques. Au sommet, les hôpitaux nationaux et les services de référence d’envergure nationale, ainsi que des structures de régulation comme le Service d’assistance médicale d’urgence (SAMU) national, constituent le dernier recours pour les soins. À l’échelle régionale, les hôpitaux et laboratoires de référence assurent les soins de santé. Les hôpitaux départementaux, les centres de santé et les postes de santé proposent quant à eux des soins promotionnels, préventifs et curatifs.
Face aux chocs exogènes comme la Covid-19, le Sénégal dispose d’une série de documents stratégiques et de mécanismes de coordination intra et multisectoriels. « Dans le domaine de la surveillance épidémiologique, le pays utilise la stratégie de surveillance intégrée de la maladie et la riposte, qui permet de détecter précocement toute épidémie ou tout événement pouvant avoir un impact sur la santé publique », explique Dr Diop. Trois approches sont employées : la surveillance basée sur les indicateurs, celle basée sur les événements et la surveillance à base communautaire.
En 2024, ce dispositif a permis de détecter une trentaine d’épidémies à travers les régions et d’apporter une riposte adéquate contre des maladies telles que la rougeole, la dengue, la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, le chikungunya, la fièvre de la vallée du Rift, le Zika et des intoxications alimentaires. Concernant l’épidémie de rougeole, la riposte nationale a mobilisé plus de 12 000 acteurs et une logistique qui a permis de vacciner plus de 7 millions d’enfants âgés de 9 mois à 15 ans en seulement 10 jours.
Par ailleurs, le Sénégal dispose d’un Centre des opérations d’urgence sanitaire (COUS), activé en 2024 pour répondre à la menace de l’épidémie de mpox. Ce dispositif d’alerte précoce a permis de tester plus d’une centaine de cas suspects à travers le pays.
Le Comité national de gestion des épidémies assure la coordination stratégique et se réunit chaque semaine en cas de crise. Ses déclinaisons régionales, départementales et locales permettent un suivi de proximité. Ainsi, lors des crues du fleuve en octobre 2024, les comités de Matam et Tambacounda ont été mobilisés pour surveiller la situation épidémiologique.
Le Sénégal bénéficie d’une expertise en ressources humaines qualifiées pour gérer ces crises, avec un dispositif modulaire impliquant tous les secteurs sous la coordination de la Primature et du Haut Conseil pour la sécurité sanitaire mondiale. Le pays est aussi le premier en Afrique à disposer d’une équipe médicale d’urgence certifiée par l’OMS.
Cependant, certains défis persistent : l’utilisation de l’intelligence artificielle pour la détection précoce, la décentralisation des laboratoires, la création d’un Institut national de santé publique, la formation continue des acteurs et l’élaboration d’un code de santé publique.
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