Le Sénégal a enregistré, ces dernières années, d’excellents résultats dans la lutte contre la mortalitématernelle et infantile. Selon Dr Amadou Doucouré, Directeur de la Santé de la mère et l’Enfant, notre pays a réussi à réduire de plus de 60% la mortalité maternelle de 2012 à 2023 là, au niveau mondial, cette réduction n’est que de 33 %.
Quelle est la situation de la santé maternelle, néonatale et infantile?
Le Gouvernement du Sénégal accorde une priorité absolue à la santé de la mère, de l’enfant et de l’adolescent. Aujourd’hui, notre pays est à un tournant décisif en matière de santé maternelle, reproductive, infantile, néonatale, de l’adolescent et de la nutrition.
La proportion de femmes ayant effectué au moins quatre visites de soins prénatals dispensées par des professionnels qualifiés est passée de 56% en 2019 à 68% en 2023. La proportion de femmes qui accouchent dans un établissement de santé est passé de 80% en 2019 à 92% en 2023. Durant la même période, la proportion de femmes qui accouchent avec l’assistance d’un personnel qualifié dans nos structures sanitaires est passée de 75 à 94%.
Le ratio de mortalité maternelle a continuellement chuté passant de 392 décès/100.000 naissances vivantes en 2012 à 153 décès/100.000 naissances vivantes en 2023, ce qui représente plus de 60% de réduction comparativement à celle mondiale qui est de 33%. Plus de la moitiéde ces décès maternels (75%) sont attribuables à des complications obstétricales directes.
L’hémorragie du post partum représente 40% des principales causes de décès maternels. Plus de 47% des décès maternels surviennent pendant les suites de couches. La mortalité néonatale est passée de 26 à 23 pour 1000 naissances vivantes entre 2012 et 2023 avec des disparités régionales. Elle est plus accentuée dans les régions de Sédhiou (58‰) et Kolda (54‰).
La prématurité (36%) et l’asphyxie (21%) constituent les principales causes de décès néonataux. Cette mortalité néonatale constitue la moitié de la mortalité infanto-juvénile laquelle a enregistréune chute très importante en passant de 65 ‰ naissances vivantes en 2012 à 40 ‰ en 2023. La prévalence contraceptive a doublé entre 2012 entre à 2019 passant de 12, 5% à 25,5% mais reste stationnaire entre 2019 à 2023 à25,6% alors que durant la même période, les besoins non satisfaits en planification familiale connaissent une diminution passant de 2 19%. L’Indice Synthétique de Fécondité est passé de 6 à 4 enfants par femme entre 1992/1993 et 2023.
Des actes forts ont contribué à l’atteinte de ces résultats suscités, parmi lesquels : le fort leadership de l’Etat, la densification de la carte sanitaire, la promotion de la couverture sanitaire universelle av des soins chez les enfants de moins de 5 ans et de la césarienne, la prise en charge globale de la petite enfance, le renforcement des capacités sur la prise en charge de la malnutrition aiguë et sur l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant.
La mise en œuvre de toutes ces stratégies a été appuyée par les partenaires techniques et financiers, facilitée et soutenue par l’existence d’une société civile dynamique et d’une politique de santé communautaire.
Quels sont aujourd’hui les défis de la Direction de la santé de la mère et de l’enfant pour booster les indicateurs?
Malgré tous les progrès importants réalisés, la mise en œuvre des programmes de la santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile, de l’adolescent et de la nutrition reste confrontée à des défis dont les plus cruciaux sont: La répartition en quantité suffisante de personnel qualifiéau niveau des structures sanitaires à tous les niveaux dela pyramide sanitaire pour une continuité des soins Obstétricaux et néonataux d’urgence pour une prise en charge précoce et correcte des complications obstétricales et néonatales, principales causes de décès maternels et néonataux, la persistance de diverses barrières socioéconomiques et culturelles qui empêche aux femmes d’avoir accès aux structures sanitaires surtoutdans le cadre de la planification familiale, la meilleure prise en compte du secteur privé dans la mise en œuvre des programmes de santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile, de l’adolescent et de la nutrition et l’amélioration de la qualité des soins en Santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile et de l’adolescent.
Quelles sont les perspectives pour atteindre les objectifs de développement durables afin de réduire davantage la mortalité maternelle et infantile ?
Le Sénégal s’est engagé à atteindre les objectifs de développement durables (Odd) de 2030 notamment la cible 3.1 des Odd relative à la mortalitématernelle (faire passer le taux de mortalité maternelle en-dessous de 70 pour 100 000 naissances vivantes) et la cible 3.2 relative àla mortalité néonatale et de l’enfant (éliminer les décès évitables de nouveau-nés et d’enfants de moins de 5 ans, notre pays doit ramener la mortalité néonatale à au moins 12 pour 1000 naissances vivantes et la mortalité des enfants de moins de 5 ans à25 pour 1000 naissances vivantes au plus). Dans ce cadre, nous avons procédé le 29 octobre 2024 à la validation politique de deux documents phares que sont le plan stratégique de la santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile, de l’adolescent et de la nutrition 2024-2028 et le plan d’Action National Budgétisé de Planification Familiale 2024-2028. Ce sont deux documents qui constituent notre boussole, ont été élaborés selon une approche inclusive et participative avec l’implication de toutes les parties prenantes de la santé reproductive et prenant en compte les orientations de l’agenda national de transformation Sénégal 2050. Ils ont fait l’objet d’une dissémination dans les quatorze (14) régions sous le leadership des gouverneurs de région pour une meilleure appropriation par les acteurs locaux dans leur mise en œuvre.
Est-ce que les autres ministères sont impliqués dans la lutte contre la mortalité maternelle?
Pour l’opérationnalisation des documents stratégiques en vue d’une mobilisation des ressources domestiques, nous avons élaboré avec l’appui du Ministère du Plan, de l’Economie et de la Coopération, 4 documents phares qui portent sur l’élimination des décès maternels liées à l’hémorragie du post partum et à l’éclampsie, pré-éclampsie, l’élimination des décès évitables chez les enfants de moins de 5 ans, l’amélioration de la santé néonatale et celle la prise en charge de la malnutrition chez les enfants de moins 5 ans au Sénégal.
Enfin, pour des stratégies basées sur des évidences et des données probantes, nous avons mené 3 études analyses approfondies qui portent sur les facteurs explicatifs de la mortalité périnatale, du non-respect du nombre de consultations prénatales recommandé et de la discontinuité de l’offre de planification familiale. Tout ceci pour vous dire que nous devons beaucoup plus d’innovations et d’audace dans nos interventions. Pour les prochaines années et dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie nationale de développement du Sénégal 2025-2029, nous allons: passer à l’échelle nationale sur l’ensemble du territoire national toutes les interventions àhaut impact en planification familiale, mettre en œuvre des plans d’amélioration de la qualité des soins de la santéreproductive, maternelle, néonatale, infantile, de l’adolescent et de la nutrition des structures sanitaires.
Nous allons améliorer dans notre politique la disponibilité des ressources humaines qualifiées et en quantité suffisante et lànous comptons travailler davantage avec les unités de formation en science de la santé des Universités de Saint Louis, Thiès, Ziguinchor et Bambey et de la faculté de médecine l’Universitéde Dakar. Nous allons renforcer aussi la surveillance des décès maternels, périnatals et riposte mais des soins Obstétricaux et néonatales d’urgence avec l’ouverture prochaine de tous les blocs opératoires des centres de santé de type 2, en améliorant ainsi l’accessibilité géographique de la prise en charge correcte et précoce des complications obstétricales.
Il y a souvent des problèmes de plateaux technique qui se posent dans certaines structures de santé, qu’est-ce qui est prévu dans ce sens ?
Le ministère de la Santé et de l’Action sociale a va mettre aux normes les équipements et infrastructures des services de néonatalogie et la mise en place d’unités de néonatologies légères au niveau des centres de santé et des maternités couplé aux soins respectueux. Exemple des pôles mères-enfants des établissements publics de santé de Pikine et de Diamniadio qui seront mis en marche cette année.
Nous allons aussi promouvoir l’utilisation de données, des preuves et de l’apprentissage pour la prise de décisions, mettre en œuvre le plan de relance des soins de santé primaires et le renforcement de la santé communautaire pour mieux prendre la question de l’équité et de la couverture des interventions. Afin, nous allons développer une communication plus ciblée et soutenue avec le développement de nouveaux partenariats avec les jeunes, les religieux, les journalistes et la communauté en général et l’organisation de la semaine de la mère et de l’enfant.
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