Problématique de la formation des infirmiers au Sénégal : l’ANIIDES prend position

Par cette présente, l’ANIIDES souhaite réaffirmer sa volonté de promouvoir et de sécuriser la profession infirmière mais aussi vous faire part de sa position quant à la problématique de la formation des infirmiers au Sénégal.

Depuis plusieurs années, les démarches d’amélioration des pratiques infirmières mises en œuvre reflètent la volonté et la capacité des cadres de la profession à remettre en cause son engagement et sa créativité dans le contexte d’évolution du système de santé. Devant cette évolution des sciences infirmières, l’ANIIDES demeure attachée, comme toujours, à la mise en œuvre du système Licence-Master-Doctorat (LMD) dans un sens inclusif et unique.

Cependant, il nous a été donné de constater que des écoles de formation en santé (pour avoir été accréditées et certifiées) continuent à délivrer des attestations de licences en sciences infirmières et obstétricales à des étudiants qui les font valoir comme diplômes à l’exercice professionnel. Cette pratique crée un profond bouleversement et un désordre sans précédent dans le milieu professionnel et mieux un risque potentiel à l’encontre de la qualité des soins et la sécurité des usagers. Vu que plus de 80% des populations reçoivent des soins délivrés par les infirmiers, il serait évident que personne ne serait à l’abri. Car, il serait produit des personnels hétérogènes non qualifiés, des « criminels » en puissance autorisés à exercer des soins infirmiers dangereux pour les patients en sursis. Cette situation laisse entrevoir des conséquences néfastes sur la population exposée aux risques incommensurables des prestations de « bourreaux légitimes » diplômés et légaux parce que engagés dans une relation contractuelle avec l’Etat ou ses démembrements ou du secteur privé. Aussi, elle constitue une limite à la mobilité des infirmiers professionnels au niveau international.

C’est pourquoi, la nécessité de distinguer la Licence professionnelle de la Licence académique s’impose. Il s’avère obligatoire d’avoir un organe régulateur en attendant la mise en place de l’ordre professionnel qui doit délivrer la Licence Professionnelle. Car l’examen professionnel, portant sur les aspects théoriques et cliniques de l’exercice infirmier, vise à déterminer si l’étudiant est apte à exercer la profession infirmière. Les situations cliniques y afférentes sont conçues pour reconnaître les bonnes pratiques sécuritaires et préventives aux fins d’éviter que les patients ne subissent des préjudices.

A ce niveau, le Ministère de la Santé et de l’Action Sociale (MSAS) constitue le socle pour l’organisation d’un examen de certification donnant quitus à l’exercice professionnel, c’est-àdire pour l’obtention d’un diplôme d’Etat d’infirmier (Grade Licence). En rappel, le diplôme professionnel certifie un niveau de connaissances et de compétences que l’on reconnaît acquis après des études et la réussite à un examen. De ce fait, l’obtention du diplôme d’Etat doit être une condition juridique nécessaire, soit pour être admis à passer un concours administratif, soit à l’exercice d’une profession réglementée. Ce faisant, ce processus permet de protéger la profession et surtout de sécuriser les populations.

L’un des principaux avantages d’un système de réglementation obligatoire est la possibilité de protéger le titre d’« infirmier diplômé d’Etat». Car, les personnes qui reçoivent des soins de santé, de même que celles qui emploient des infirmiers, ont le droit de savoir si elles ont affaire ou non à un infirmier légalement qualifié. En plus, le fait de réserver le titre d’« infirmier diplômé d’Etat» aux personnes qui remplissent les critères légaux renforce les protections publiques en permettant au public de faire une distinction entre les infirmiers légalement qualifiés et les autres fournisseurs de soins infirmiers.

Au demeurant, l’ANIDES s’oppose à toute tentative tendant à déstabiliser le système de santé à travers la formation des personnels infirmiers de multitudes institutions où chacune délivre un diplôme de Licence. Cette situation va entraver lourdement la qualité des ressources humaines produites, les programmes de santé ainsi que la sécurité des populations.

Face cette situation, l’ANIIDES préconise de :

  1. Mettre en place un cadre de concertation entre le MESRI, le MSAS et le MFPA pour un système de régulation de l’exercice professionnel en attendant la création d’un ordre infirmier ;
  2. Mettre en place l’ordre des infirmiers et ses organes de fonctionnement : ce qui devrait, à terme, améliorer la sécurité sanitaire des populations, la qualité des soins et les performances du système national de santé ;
  3. Distinguer la Licence professionnelle de la Licence académique ;
  4. Considérer le MSAS comme le socle pour l’organisation d’un examen de certification donnant quitus à l’exercice professionnel, en attendant un ordre infirmier ;
  5. Tenir régulièrement l’examen de certification, dans le respect du calendrier académique et des normes établies ;
  6. Poursuivre l’organisation d’un examen de certification du même programme de licence en sciences infirmières et obstétricales par le MSAS à l’intention des étudiants de toutes les écoles et universités pour quitus à l’exercice profession d’infirmier et de sage-femme c’està-dire l’obtention d’un diplôme d’Etat d’infirmier (Grade Licence) ; 
  7. Procéder à une massification du corps des enseignants dans le domaine des sciences infirmières et obstétricales par l’ouverture des filières de Master et Doctorat au niveau des universités ;
  8. Résoudre le problème des étudiants infirmiers sortants de 2022 de l’ENDSS : admis par un arrêté du MSAS, ils n’ont pas été inscrits à l’examen de certification et ont obtenu un diplôme de licence d’école constituant une lourde entrave aux règles élémentaires de l’administration ;
  9. Former les enseignants des Centre Régionaux de Formation en Santé (CRFS) au Master et Doctorat en Sciences Infirmières ou Sciences de l’Education pour le renforcement de la formation du personnel infirmier et obstétrical mais aussi pour l’accompagnement de l’ouverture et la mise en œuvre des filières de Master ;
  10. Ouvrir des programmes de Master et Doctorat en sciences infirmières au niveau des Universités, car il nous été donné de constater que des étudiants sénégalais en Master à l’UGB sont encadrés par des Doctorants d’autres nationalités ; 
  11. Créer une Direction des soins infirmiers et obstétricaux au Ministère de la santé.

L’objectif de la restriction de l’utilisation du titre d’« infirmier diplômé d’Etat » est de protéger le public des actes de personnes non autorisées à pratiquer en tant qu’infirmiers et prétendant prodiguer des services de santé qui sont l’apanage des infirmiers.

Ismaila MBAYE
Président de l’ANIIDES

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