Le cancer du col de l’utérus demeure l’un des principaux problèmes de santé publique au Sénégal, constituant une des premières causes de mortalité chez les femmes. Face à cette urgence sanitaire, l’Institut Pasteur de Dakar a intensifié ses efforts pour renforcer la prévention, le dépistage et l’accès à la vaccination contre le papillomavirus humain (HPV). c’était lors d’un symposium qui s’est déroulé hier à Dakar
Le cancer du col de l’utérus demeure l’une des principales causes de mortalité chez les femmes au Sénégal. « Conscient de cette réalité alarmante, l’Institut Pasteur de Dakar s’est engagé à plusieurs niveaux dans la lutte contre cette maladie, en collaboration avec le ministère de la Santé, l’hôpital Aristide Le Dantec et la Fondation Buffet », explique Amadou Alpha Sall, Administrateur de l’Institut Pasteur de Dakar.
À l’occasion d’un symposium dédié à cette problématique, l’Institut Pasteur a présenté les conclusions d’une étude nationale menée à travers le pays grâce à un laboratoire mobile. Cette initiative a permis d’évaluer l’état des lieux, d’identifier les obstacles et d’explorer des solutions pour améliorer la prévention et le dépistage.
L’Institut Pasteur a récemment conclu une étude nationale menée en collaboration avec le ministère de la Santé, l’hôpital Aristide Le Dantec et la Fondation Buffet. Ce travail a permis d’évaluer l’ampleur du cancer du col de l’utérus au Sénégal et d’identifier les principaux obstacles à sa prévention et à sa prise en charge. Le symposium a été l’occasion de présenter les premières conclusions de cette recherche et d’ouvrir des perspectives sur les solutions à mettre en place.

Des actions concrètes pour améliorer le dépistage et l’accès aux soins
Pour répondre aux défis identifiés, l’Institut Pasteur met en place plusieurs initiatives, selon Amadou Alpha Sall :
- Dépistage mobile : Grâce à un laboratoire mobile, l’Institut a pu couvrir plusieurs régions du pays afin de favoriser l’accès aux tests et d’accompagner les autorités sanitaires dans leur politique de prévention.
- Fabrication locale des tests diagnostiques : Une réflexion est en cours avec les partenaires de l’Institut pour produire ces tests directement au Sénégal, facilitant ainsi leur accessibilité.
- Production locale du vaccin contre le papillomavirus : L’Institut Pasteur travaille avec ses partenaires pour que le vaccin, déjà intégré dans le programme national de vaccination des jeunes filles, puisse être fabriqué au Sénégal.
En plus des efforts techniques et logistiques, l’Institut Pasteur mène des recherches en épidémiologie et en socio-anthropologie. L’objectif est d’identifier les freins à la vaccination et aux campagnes de sensibilisation, afin d’adapter les interventions aux réalités locales et d’optimiser leur efficacité.
L’engagement de l’Institut Pasteur ne se limite pas au cancer du col de l’utérus. Le Dr Amadou Alpha Sall a également annoncé la mise en place prochaine d’une plateforme d’analyse génétique dédiée aux cancers gynécologiques, notamment le cancer du sein. Cet outil, actuellement inexistant au Sénégal, sera déterminant pour améliorer la prise en charge des patientes et guider les décisions thérapeutiques.
Enfin, le Dr Sall a tenu à remercier l’ensemble des partenaires impliqués dans ces initiatives, notamment le ministère de la Santé, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), liSCA et d’autres institutions collaborant à cette lutte contre le cancer.
Grâce à ces différentes actions, l’Institut Pasteur de Dakar s’impose comme un acteur clé dans la prévention, le dépistage et la prise en charge du cancer du col de l’utérus et des autres cancers gynécologiques au Sénégal.
Les efforts du gouvernement sénégalais
Habib Demba Ndiaye, représentant du ministère de l’Action sociale (MSAS), rappelle que plus de 2 000 nouveaux cas de cancer sont enregistrés chaque année au Sénégal. « Malheureusement, ces chiffres ne représentent que 7 % de l’ensemble des cancers féminins dans le pays, avec plus de 1 200 décès annuels », alerte-t-il. Depuis 2022, un registre national du cancer a été mis en place pour collecter des données précises. Cette initiative permet une meilleure planification des stratégies de lutte contre la maladie.

Le ministère de la Santé a fait de la lutte contre le cancer une priorité absolue. Les stratégies actuelles sont alignées sur le Plan national stratégique contre le cancer 2025-2029 et visent à accélérer l’élimination du cancer du col de l’utérus d’ici 2030. « Les principes 70-60-90 de l’OMS guident ces efforts : vacciner 90 % des filles de moins de 15 ans, dépister 70 % des femmes avant 45 ans, et prendre en charge 90 % des lésions précancéreuses », explique Habib Demba Ndiaye.
Le Sénégal a également investi dans la formation de spécialistes en oncologie médicale et en radiothérapie. « Deux promotions de radiothérapeutes ont déjà été formées, et quatre appareils de radiothérapie sont opérationnels dans le secteur public », précise-t-il. Le coût de la radiothérapie a été subventionné à 150 %, réduisant ainsi le fardeau financier pour les patients.
Par ailleurs, la chimiothérapie bénéficie d’une subvention de 1,5 milliard de francs CFA depuis huit ans, et un Centre national d’oncologie est en construction, avec une livraison prévue pour juin 2025.
Un soutien indispensable de la société civile
Dr Fatma Guenoune, présidente de la Ligue Sénégalaise contre le Cancer (LISCA), met en avant le rôle crucial des organisations non gouvernementales et des chercheurs dans cette lutte. « La sensibilisation et la formation des ressources humaines sont des éléments fondamentaux pour améliorer la prise en charge des patients », insiste-t-elle.
La LISCA collabore étroitement avec l’Institut Pasteur de Dakar pour mieux comprendre les spécificités locales du cancer du col. « Nous avons identifié que les types de HPV 16 et 18, bien que répandus, ne sont pas les seuls responsables des cas de cancer du col au Sénégal. D’autres types de HPV, spécifiques à notre région, ont également été détectés », explique Dr Guenoune.
Le dépistage précoce est essentiel pour réduire la mortalité liée au cancer. Pourtant, « beaucoup de femmes ne se font pas dépister par manque d’information ou par peur », déplore Dr Guenoune. Pour remédier à cette situation, la LISCA, en collaboration avec le ministère de la Santé, a formé plus de 3 000 sages-femmes à travers le pays pour réaliser des prélèvements et sensibiliser les femmes lors des consultations prénatales.
Le Sénégal a été un pionnier en Afrique en matière de campagnes de sensibilisation comme Octobre Rose. « Cette initiative, initialement axée sur le cancer du sein, s’est élargie pour inclure d’autres types de cancers, notamment le cancer du col », indique Dr Guenoune. Grâce à cette approche inclusive, un large public a été mobilisé et encouragé au dépistage.
Un avenir sans cancer : un objectif réalisable
« Notre objectif ultime est de créer un Sénégal sans cancer », affirme Dr Guenoune. Pour y parvenir, il est impératif de continuer à investir dans la recherche, la formation des professionnels de santé et la sensibilisation des populations. La collaboration entre la LISCA, l’Institut Pasteur, le ministère de la Santé et d’autres acteurs est essentielle pour renforcer les stratégies de prévention et de prise en charge.
Le combat contre le cancer du col de l’utérus et d’autres formes de cancer est un défi collectif. Grâce à des efforts conjugués et une volonté politique affirmée, le Sénégal est en bonne voie pour réduire significativement l’impact de cette maladie et améliorer la qualité de vie de ses citoyens.
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