C’est un grand jeune homme de 25 ans qui vit au bord du fleuve dans le nord du Sénégal. Très jeune il urinait du sang, il ne s’en est jamais inquiété. Pour lui sa signifiait qu’il devenait un homme et d’ailleurs sa c’était arrêté seul sans traitement.
Mais là il maigrissait, il digérait mal et son visage enflait surtout le matin au réveil. Il avait fait des analyses et son médecin lui avait simplement dit qu’il lui fallait aller à Dakar. Il a vendu sa vache et c’est mis en route estimant son retour à la semaine prochaine.
Six heure du matin, il fait froid, les gens indifférents le dépasse sans le voir, il est de plus en plus fatigué mais pour lui c’est le résultat du très long voyage qu’il vient de faire, de toutes les façons quoiqu’il arrive il est en sécurité il est au porte du fameux « Dantec ».
La gêne respiratoire s’aggrave, il demande de l’aide mais personne ne le comprend, il s’affale sur le sol…. Sept heure trente, l’agent charger de l’accueil le remarque enfin, il est d’urgence conduit en réanimation … il peut maintenant perdre connaissance, il est sauvé.
Troisième jour d’hospitalisation, il pense avoir survécu au pire il est conduit en Urologie, il appelle ses parents pour les rassurer, tout va bien leur dit-il, tout va bien pense-t-il.
C’est à ce moment que je pénètre dans la salle. Les résultats des examens sont sans appel, ses reins sont détruits par les séquelles d’une bilharziose mal prise en charge. Khassim n’a plus que deux alternatives la dialyse ou la transplantation.
On se regarde on sait ce que ça signifie dans ces conditions, il est condamné. Il nous fait un grand sourire traduisant sa reconnaissance et son admiration pour notre profession, on lui tourne le dos.
Pour nous il vaut mieux ne pas avoir de liens affectifs avec lui…. Plusieurs jours après, je rentre dans la salle, le lit vide de Khassim me demande pourquoi? Pourquoi faut-il continuer …. ? Il n’y pas l’ombre d’un doute il faut transplanter. Le temps que » le premier à transplanter » finisse de faire la tournée des télévisions et reçoivent prix et médailles, combien de Khassim seront ailleurs?
Nous ne sommes pas des sportifs, nous ne serons pas jugés par notre galerie de trophées. Ceux qui nous jugerons au final sont ceux que nous avons laissé au bord de la route.
20 septembre 2018
Professeur Alain Khassim Ndoye
Urologue/Le Dantec